Crédit photo : France 3

Je suis triste et ému, car j’ai compris quelque chose ce week-end. Je l’ai compris pendant le match contre le Paris FC, mais c’est la conclusion d’une semaine entière, avec la fin du match contre Le Havre et la conférence de presse : la version du Racing que j’ai le plus aimée n’existera peut-être plus.

Quand, il y a quelques mois, on m’a annoncé que j’allais être père d’un petit garçon, je me suis dit que je voudrais le plus vite possible lui présenter le Stade de la Meinau. Mais, comme le Racing, je crois que la version du Stade de la Meinau que j’ai le plus aimé n’existera peut-être plus.

Si j’en avais tant envie dès l’annonce de cette future naissance, c’est indéniablement grâce à Marc Keller (et d’autres), pour le travail qu’il a réalisé en ramenant le club en Ligue 1 et même davantage. Mais aussi pour le souffle positif qu’il a insufflé et surtout l’unité qu’il avait réussi à recréer après des années d’un Racing déjà bien triste et divisé.

J’en avais tant envie car le Racing ressemblait et représentait notre région : indépendante, unie, populaire…

J’en avais tant envie car le Racing ne ressemblait à aucun autre club.

Mais si j’en avais tant envie, c’est d’abord grâce à l’ambiance insufflée et portée par les Ultra Boys 90 & les associations de supporters, ceux que le club veut désormais contrôler et réguler. Aller au stade, qui plus est avec ses amis d’enfance, c’était y vivre des émotions fortes, des journées mémorables et des souvenirs pour la vie. Ces souvenirs sont des moments de tribunes, des chants, des sauts, des épaules serrées, des mains claquées.

Mais dans quelques mois, je devrai présenter à mon fils un stade où siffler quand on est 15e ou un joueur qui rate dix occasions de suite, c’est être un « bon supporter ».

Je devrai présenter à mon fils un stade où ceux qui se souviennent de nos défunts, ceux qui célèbrent l’histoire de notre ville et de notre région, ceux qui animent et font vivre ma chère tribune, ceux qui se déplacent partout en France, même dans des divisions inférieures et des années de maintien, ceux qui consacrent leur vie au Racing, sont désormais pris pour cibles, car ils croient et clament que l’argent à tout-va ne doit pas être le moteur d’un club. Ou encore que les valeurs valent autant que les résultats et que ces derniers, bons ou mauvais, ne doivent pas conditionner la façon de supporter.

Je devrai présenter à mon fils un club qui appartient à un autre club.

Je devrai présenter à mon fils un club où le capitaine peut poser, suite à son transfert en pleine saison, avec le maillot de son club “grand-frère” sans que personne n’y voie un problème ou ne pense à ce que les supporters peuvent ressentir.

Un stade où des amoureux du Racing sifflent d’autres amoureux du Racing qui défendent un football et des valeurs d’un club qui ont déjà trop changé.

Alors oui, je serai fier de lui présenter un Racing qui devrait tutoyer les sommets des classements, mais est-ce que ces derniers jours nous n’avons pas tous plus perdu que ce que nous allons gagner ?

Alors oui, je vais présenter ce nouveau Racing et ce nouveau stade à mon fils, et il en pensera ce qu’il voudra. Je serai avec lui en tribune, mais sans aucun doute moins exalté par ce Racing version multipropriété.

Et pourtant, je garde espoir. Car je sais qu’il y aura toujours des amoureux du Racing pour défendre le Racing que j’aime, pour refuser qu’il se perde dans l’anonymat d’une multipropriété, pour rappeler que ce club n’est pas une simple entreprise mais une part de notre identité. Tant qu’il existera des voix prêtes à se lever, le Racing que j’aime ne disparaîtra jamais vraiment.

Un seul amour et pour toujours : Racing Club de Strasbourg !

Xavier, supporter de la Tribune Ouest