Lors sa venue il y a quelques semaines, Gilbert Gress était accompagné d'un ami de longue date. Spectateur du retour de son ami au Racing, André nous livre aujourd'hui à travers quelques chapitres un regard atterré de l'aventure qu'a vécu Gilbert Gress pendant quelques semaines, cet "été en enfer" en mode Racing Club de Strasbourg ... Si vous souhaitez réagir, utilisez le manu contact à votre disposition. Les autres chapitres sont à retrouvés dans la rubrique "Auditeurs" !

CHAPITRE 3

29 JUIN : Cohade, J.Fanchone, Traoré, Shereni, Szelesi, les meilleurs joueurs sont déjà partis. Bien avant le retour de Gress, le Racing dégraisse. Le technicien alsacien a de tout temps privilégié un effectif restreint et motivé plutôt que pléthorique comme Papin ou Furlan. Mais il a aussi demandé le renfort de trois ou quatre bons joueurs qu'il n'obtiendra jamais. Léon est au club depuis si longtemps qu'il fait partie des murs. Gilbert lui demande son avis sur les joueurs du club. «Je ne peux rien te dire, je ne les connais pas» répond l'ancien stoppeur. Dans les clubs sérieux, le recrutement débute en janvier. Le recruteur a du flair, un bon carnet d'adresses, effectue des kilomètres en voiture ou en train pour superviser, voir même «épier» les futures recrues. De cette façon, fin juin, les bonnes affaires sont toutes pliées. Au Racing, c'est le moment pour la cellule de recrutement du frangin Pierre et de Casoni de sortir de sa torpeur. Et pour cause. Depuis des mois, les frères Ginestet et Jean-Marc Furlan ne s'adressaient plus la parole, tout comme d'ailleurs les staffs techniques et médicaux, brouillés eux aussi. Quel guêpier! Le standard croule sous les appels de managers désireux de placer leurs poulains restés sur le carreau, des joueurs blessés ou sans passé ni avenir. Cependant, deux marocains seront recommandés par un intermédiaire suisse fiable. Gilbert voulait les tester au stage. Ils ne verront même pas le sol français, tant le club aura fait traîner (volontairement ?) l'obtention des visas. Par presse interposée, l'actionnaire majoritaire reprochera, entre autres, à Gress d'avoir refusé S. Grax. Ignorait-il que ce buteur qui a disputé en LI entre 2007 et 2009,en 24 matchs, aura réussi l'exploit de marquer 1 but! Pour la saison actuelle, le budget est passé de 20 à 12 millions, soit moins 40 %. En tenant compte des frais incompressibles que sont le centre de formation, les déplacements, la location du stade et le personnel administratif, la masse salariale de l'effectif pro, soit le moteur du club, est réduit de près de 70 %, ce qui est énorme. Imaginez un instant la réaction de l'actionnaire majoritaire si Gress avait pris ce joueur qui demandait un salaire annuel de 720.000 euros. Non, non, vous ne rêvez pas, il s'agit bien du salaire moyen d'un joueur de L1 Gress est de retour depuis 10 jours, Ginestet s'est mis en retrait du club. Cela ne l'empêche pas d'appeler Papin pour tenter de le faire revenir. Pendant ce temps, Specht répétera pour la énième fois à Gilbert: «l'en ai marre de lui, il est temps qu'il vende ses parts et se casse ». Quelle bande de faux-culs!

6 JUILLET : Le groupe est en stage de préparation à Amphion-les-Bains, station balnéaire de Haute-Savoie préconisée par Furlan, Gilbert aurait choisi en endroit près de Strasbourg. Dès leur arrivée, Bah, Gargorov et Marcos, handicapés par des problèmes physiques, ne peuvent pas s'entraîner. Or, en stage, la présence de joueurs dans l'incapacité de suivre le groupe est inutile, voire néfaste au groupe. Ils retourneront donc dès le lendemain à Strasbourg afin de bénéficier de soins auprès des médecins et soigneurs du club. Le lendemain, sans le journal l'Equipe, S. Keller des DN publie un article sur le stage intitulé «Gress les use déjà! Trois joueurs souffrant de soucis musculaire ont dû quitter le stage de préparation mené à un rythme intensif» écrit-il plus loin. C'est sans doute plus vendeur d'attaquer Gress et défendre les pleureuses plutôt que d'interroger des pros tels Cassard ou Lacour ou des jeunes Gueye et Ledy, qui ont pleinement conscience de progresser (sans jeu de mots), ou encore d'évoquer la bonne ambiance qui règne au stage. Mais chacun joue dans sa cour n'est-ce pas !

13 JUILLET : Le club a encore transféré Ducrocq, Dja Djedje et Paisley, tandis que JA. Fanchone, Marcos et Gargorov, appartenant au club, ne seraient pas retenus s'ils trouvaient preneur. Au retour de stage, Ducrocq critique dans la presse les méthodes à l'ancienne de l'entraîneur. Il en remettra une couche depuis le modeste club de Kavala en Grèce pour fustiger Gress et son ancestral schéma tactique du libero décroché. 50 ans d'expérience, une soixantaine de camps d'entraînements et une bonne centaine de matchs européens. Loin d'un football sclérosé, Gress demande un jeu de mouvement où tout le monde peut marquer. Exemples du seul Racing : en 79 Specht et Marx 7 buts - de 91 à 94 Leboeuf 33 buts - Cobos 92 7 buts. En 12 ans de carrière, le milieu de terrain Ducrocq a marque 3 buts. Et ce type joue les donneurs de leçons. Heureusement que le ridicule ne tue pas. D'autres tels Paisley, sont conviés par l'actionnaire majoritaire de médire l'entraineur s'il refuse de leur accorder le bon de sortie. « Calomniez, calomniez, il en restera toujours quelque chose ... »disait Beaumarchais. A trois semaines de la reprise, une seule recrue, Pichot. Et dire que l'entraîneur répète depuis un mois qu'une saison réussie se construit sur un recrutement judicieux et une bonne préparation d'avant saison.

CHAPITRE 4

16 JUILLET : Le Racing rencontre les SR Colmar en match préparatoire avec l'équipe suivante: Cassard, Pichot, Pelé, Paisley, Fanchone, Damour, Lacour, Othon, Dja Djedje, Marcos et Bezazz. La 1ère mi-temps est correcte, malgré une évidente inefficacité offensive. Gurtner, Abadie, Zenke, Ledy et Gasmi rentrent en seconde période, totalement dominée par les Haut-Rhinois. Faut-il être aveugle pour ne pas voir qu'avec ce groupe, ambitionner la montée était totalement utopique ? Après la rencontre, Gilbert rappelle à Léon l'extrême nécessité de faire venir d'urgence trois ou quatre bons joueurs. Mais le prési botte en touche en déplorant que les joueurs blessés ne se soignent aujourd'hui plus que bio. Se pointe alors, l'allure débonnaire, l'actionnaire majoritaire. Gilbert lui demande :

  •  Vous avez vu tout le match ?
  • Oui, oui, j'étais présent depuis le début.
  • Et alors, qu'est-ce que vous en pensez?
  • J'ai vu jouer deux équipes de CFA.

Gilbert n'apprécie pas cette réponse méprisante. En réalité, il s'est juste trompé de division. Le Racing, dernier en L2 et les SR, leader en CFA risquent fort de se retrouver en National la saison prochaine. Ce genre de match fournit souvent l'occasion de revoir des connaissances. Ainsi, j'ai croisé avec plaisir Richard Godié, inoxydable président du toujours actif Football club G. Gress, quand bien même se sont les enfants des membres créateurs qui jouent à présent, René Maechler vice-président en 79, Albert Gemmrich, Joël Tanter, Roland Wagner et bien d'autres. Du côté colmarien, comment ne pas saluer le coach des SR Damien Ott, la pétillante Corinne et bien sûr l'ineffable Frédéric. M'autorisez-vous un petit hors sujet pour vous parler du supporter numéro un de Gilbert. Frédéric, jeune homme résidant près de Mulhouse, est un passionné de foot. De l'épopée 91 - 94, il ne rate aucun match. Surtout pas le dernier. Ce soir de mai, toute la Meinau chantera un inoubliable « Ce n'est qu'un au revoir Gilbert ». Mais pas Frédéric. G. Gress quitte le Racing pour Neuchâtel, désormais Frédéric ne va plus descendre le cours du Rhin, mais le remonter. Il suivra bien sûr tous les matchs de Xamax à la Maladière. Mais, travaillant en équipe du soir, disposant ainsi de ses après-midi, pendant 7 ans, été comme hiver, pluie ou neige, il assistera depuis les tribunes à tous les entraînements. Et cela dans la plus grande discrétion. Frédéric aura bientôt 30 ans. Son ami Damien, en quête d'un cadeau original, appelle Gilbert et lui raconte l'histoire de ce supporter. Les deux techniciens échafaudent alors un plan consistant à attirer Frédéric dans un restaurant de la Meinau, pour un supposé repas d'affaires. Imaginez la surprise et le bonheur de Frédéric quand Gilbert apparaît et s'installe à sa table.

20 JUILLET : Dans les DN, une page est consacrée à l'ex-président qui veut « rompre la glace ». Avec qui est-il en froid, mystère. Le titre de l'article l'est tout autant: Briser un jour le signe indien ». L'article semble destiné à dédouaner quatre années de gestion calamiteuse. Mais pas seulement, le Chevalier Blanc préparait déjà son retour. Question de Fr ; Namur: - Si vous ne souhaitez plus intervenir directement, Gress a accepté de relever le défi de la remontée, bien informé par le président des moyens réduits. Il a le groupe restreint tel qu'il le souhaitait. On est bien loin des propos lénifiants tenus généralement en pareil cas. Mais au moins c'est clair, la chasse à l'homme est lancée. Ensuite: - Il y a aujourd'hui un triptyque alsacien aux commandes, puisqu'on peut y associer Gemmrich, le président de la LAFA. Etrange non ?A ce jour, la LAFA n'avait que des présidents alsaciens et elle ne gère que le foot amateur. Quel autre intérêt à évoquer un trio sinon pour élargir le duo Specht-Gress à Gemmrich, autre champion 79, afin de dégommer le football alsacien. Je n'accepte pas le faux procès fait au Racing de ne pas privilégier les jeunes Alsaciens, mais il faut s'interroger sur le véritable niveau du football dans la région dont les résultats des équipes de jeunes sont mitigés. Pourquoi lancer ce faux débat. Sans doute est-il pas plus facile de chercher la paille dans l' oeil de la LAFA que d'ôter la poutre dans celui du Racing. Comment, après une telle attaque, la LAFA a-t-elle pu demeurer muette.

26 JUILLET : Près de 2.500 spectateurs se sont déplacés au Parc des Sports de Haguenau pour le dernier match de préparation du Racing contre Karlsruhe, relégué en Bundesliga 2. A une semaine de la reprise officielle, le Racing teste encore trois joueurs. Seul Sikimic, un Serbe apprécié par Janin pour l'avoir croisé en Bretagne, sera retenu. Voilà qui donne une petite idée sur la valeur de la dizaine de joueurs proposés par la cellule. Faut-il rappeler que les joueurs cadres sont quasiment tous partis et que l'objectif clairement affiché est de monter en L1. La rencontre, assez plaisante, se terminera sur un match nul 1 - 1. La défense du Racing paraît solide, hélas, l'avenir justifiera l'adage des apparences parfois trompeuses. En attaque, un ailier et surtout un buteur font toujours cruellement défaut. Etait-ce par excès d'optimisme, en tout cas, Marcos m'avait bien plu. J'en discute avec Tanter et Wagner en quittant le stade. Fureur du breton barbu qui avait donné le coup d'envoi du match! - Mais non, il n'est pas bon, il ne fait que ralentir le jeu. Comme il avait raison Joël. Peut être que ce jour là, le Brésilien était juste un plus motivé que d'habitude.

29 JUILLET : Retour à la Meinau pour retirer mon abonnement. Près de l'entrée billetterie, Jean-Marie Blum le Président du Comité Central des Supporters, installé derrière une table, joue les sergents recruteurs. Un peu plus loin, les UB90 font de même. A leur sujet, comment ne pas s'étonner de la mansuétude dont ils font preuve à l'égard de Ginestet et des dirigeants. Mais bon, ils ont au moins la reconnaissance du ventre. Al'époque, Gindorf leur offrait occasionnellement la soupe, à présent, l'ami Philippe donne carrément la becquée à lors de l'un ou l'autre déplacement. Autres temps, autres moeurs. A la location Catherine et Christine, toujours aussi charmantes, m'accueillent chaleureusement. Le plaisir est réciproque. Un petit tour sur le terrain annexe pour assister à la fin de l'entraînement. Que font les retraités après la pluie, ils font un tour au jardin et en forêt. J'ai donc ramené ma traditionnelle tarte aux fruits de saison, myrtilles en l'occurrence et un joli panier de boeletus aestivalis selon Gérard, cèpes de Bordeaux pour les mycophages. Le coach est un peu grognon.

  •  Merci pour la tarte, surtout remercie bien Jeannine. Mais des champignons ! Depuis le temps, tu devrais le savoir, jamais de champignons ni de concombres. Ouf! Heureusement que j'ai oublié de faire un détour par le jardin!
  • De toute ma carrière, je n'ai jamais eu un groupe aussi faible, aussi peu motivé. Et l'autre qui me taille sans arrêt.
  • Nous venions de croiser Rodrigo, le milieu défensif de retour après deux saisons au Japon. Pour remonter le moral de mon ami, je glisse : Enfin un bon renfort.
  • Ah oui, et tu l'as vu jouer quand la dernière fois pour dire ça ? Il avait encore raison le bougre.

La suite dans quelques jours ...